Saisi d’un pourvoi contre un arrêt de la chambre d’instruction qui a fait droit à une requête en nullité du gardé à vue pour défaut d’entretien préalable avec son avocat avant son audition, la cour de cassation a rejeté le pourvoi.
En l’espèce, l’intéressé a été placé en garde à vue des chefs de diverses infractions. Lors de la notification de ses droits, il a demandé et a bénéficié de l’assistance d’un avocat.
Sa garde à vue a été prolongée et il a continué à bénéficier de l’assistance d’un avocat.
Toutefois, il s’est vu notifier une extension de la garde à vue des chefs de diverses infractions pour d’autres faits. Lors de la notification de ses droits, il a encore demandé et a de nouveau bénéficié de l’assistance d’un avocat.
Il a été entendu sur ces faits en présence de son avocat mais n’a pas bénéficié d’un entretien préalable avec celui-ci.
Le lendemain il a été mis en examen pour ces derniers faits. Son avocat a déposé une requête en nullité de ce que son client n’avait pas bénéficié d’un entretien préalable avec son avocat avant son audition.
Pour le parquet général, l’article 65 du code de procédure pénale, relatif aux droits de la personne gardée à vue qui fait l’objet de la notification d’une infraction supplétive, prévoit que celle-ci doit faire l’objet des informations prévues aux 1°, 3° et 4° de l’article 61-1 et être avertie de son droit d’être assistée d’un avocat conformément aux articles 63-3-1 à 63-4-3 mais ne prévoit pas le droit de s’entretenir avec un avocat. En jugeant que l’article 65 ouvrait droit à un entretien avec un avocat, la chambre de l’instruction a violé les articles 63-3-1, 63-4, 65, 591 et 593 du code de procédure pénale
Mais la haute juridiction ne partage pas cet avis.
Selon la Cour, il résulte des articles 6, § 3, de la Convention européenne des droits de l’homme, 48, § 2, de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, 3, § 3, a) de la directive n° 2013/48/UE du Parlement et du Conseil du 22 octobre 2013, préliminaire, 63-3-1, 63-4 et 65 du code de procédure pénale que pour que soit garanti le droit effectif et concret à l’assistance d’un avocat au stade de l’enquête, toute personne entendue sur des faits qu’elle est soupçonnée d’avoir commis ou tenté de commettre a le droit, si elle a demandé à être assistée d’un avocat, de s’entretenir au préalable et confidentiellement avec celui-ci.
Dès lors, la personne gardée à vue qui est entendue dans le cadre d’une procédure suivie du chef d’une infraction autre que celle ayant justifié le placement en garde à vue et à l’encontre de laquelle il existe des raisons plausibles de soupçonner qu’elle a commis ou tenté de commettre cette infraction bénéficie, après avoir été avertie de son droit d’être assistée d’un avocat et si elle a déclaré vouloir l’exercer, du droit de communiquer avec celui-ci dans des conditions qui garantissent la confidentialité de l’entretien, pour une durée ne pouvant excéder trente minutes, avant toute audition sur les nouveaux faits.
Certes, la personne gardée à vue peut renoncer à ce droit, expressément ou tacitement, notamment lorsqu’elle accepte, en présence de son avocat, qu’il soit immédiatement procédé à son audition sans entretien préalable.
De même l’avocat peut aussi estimer qu’il n’y a pas lieu à entretien préalable et y renoncer tacitement, notamment lorsqu’il ne demande pas à communiquer confidentiellement avec la personne gardée à vue avant son audition.
Mais la Cour a considéré que le droit de la personne gardée à vue à un entretien confidentiel avec un avocat avant son audition dans le cadre d’une procédure suivie du chef d’une autre infraction, tel qu’énoncé ci-dessus, ne résultait pas de façon évidente de la lettre des articles 65, 63-3-1 et 63-4 du code de procédure pénale, le fait que, d’une part, l’avocat n’ait pas expressément demandé à s’entretenir confidentiellement avec son client, d’autre part, celui-ci, en présence de son avocat, ait accepté d’être entendu sur les nouveaux faits sans entretien préalable, ne peut être interprété comme une renonciation tacite par l’avocat à cette prérogative de sa fonction ou par le gardé à vue au bénéfice de ce droit
La Cour de cassation a ainsi rejeté le pourvoi. (Cass. crim., 2 mars 2021, n° 20-85.491)
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